Depuis plusieurs années, la France fait face à une véritable pénurie d’agents de sécurité cynophiles de qualité. Jean-Claude BROCHE en détaille les raisons ainsi que le parcours de formation d’une équipe cynophile.

Pour répondre efficacement au contexte accru de menaces de la société civile et des entreprises, les sociétés de sécurité privée privilégient l’embauche de personnels très qualifiés. Parmi, les fonctions les plus recherchées figurent les agents de sécurité cynophiles, aussi appelés “maîtres-chien”. En effet, du fait des excellentes capacités olfactives et auditives du chien, l’agent cynophile est capable détecter une situation anormale bien plus rapidement qu’un agent de sécurité seul. Par ailleurs, le chien constitue un élément dissuasif très fort et peut protéger l’agent lors d’une intervention. C’est pourquoi la présence d’une équipe cynophile est particulièrement efficace pour sécuriser des sites jugés à risques ou encore de vastes étendues (entrepôts, ports, etc.).

Reste qu’il y a actuellement une réelle pénurie d’agents de sécurité cynophiles de qualité sur tout le territoire français. Les effectifs sont largement insuffisants pour couvrir les demandes des entreprises. Jean-Claude BROCHE, directeur du CFPS (Centre de Formation des Personnels de Sécurité) de Morangis – qui forme actuellement 12 futurs agents cynophile pour le compte de la société GORON – nous détaille les raisons de cette pénurie et le parcours de formation d’une équipe cynophile.

Peu de candidats et une sélection rigoureuse

La première raison de cette pénurie est la manque de candidats au départ. D’abord le métier ne jouit pas toujours d’une très bonne image. S’ajoute à cela une réelle problématique d’hébergement : beaucoup de bailleurs refusent la présence d’animaux de compagnie dans les logements qu’ils louent. Or, dans la mesure où les sociétés de sécurité privée n’ont pas le droit de fournir de chiens, l’agent cynophile doit nécessairement pouvoir garder son chien chez lui. Cette difficulté est particulièrement aiguë en Île-de-France, l’une des régions dans lesquelles le besoin d’équipes cynophiles est justement le plus important.

Par ailleurs, la sélection des candidats est très rigoureuse car il s’agit de recruter un binôme performant. “Le maître et le chien doivent tous les deux avoir des prédispositions pour le métier, sans quoi le duo ne fonctionne pas. Pour retenir les 12 binômes actuellement formés pour la société GORON, j’ai dû en voir 82 au total ” explique Jean-Claude Broche.

Pourquoi un tel manque d’agents de sécurité cynophiles en France ? – RNMPS
Crédit photo : ©GORON

Si la sélection est aussi rigoureuse, c’est que beaucoup de critères entrent en jeu. D’abord, le maître doit passer un test écrit pour évaluer son niveau rédactionnel. S’il le réussit, il est alors convié à un entretien individuel pour démontrer sa motivation et la cohérence de son projet. Le métier est très exigeant et le bon candidat n’est pas seulement celui qui aime les chiens. Il doit aussi comprendre et accepter qu’il devra avant tout être un bon agent de sécurité.

Le métier est très exigeant et le bon candidat n’est pas seulement celui qui aime les chiens. Il doit aussi comprendre et accepter qu’il devra avant tout être un bon agent de sécurité.

Ensuite, en ce qui concerne le chien, il y a une première sélection naturelle dûe à l’âge et à la race. Il doit avoir entre 18 et 24 mois pour être formé. Par ailleurs, toutes les races ne sont pas autorisées à l’exercice. On privilégie les chiens qui ont des dispositions naturelles pour le métier – au caractère stable, courageux et travailleurs – tels que les bergers allemands, bergers belges (malinois, tervuren, groenendael), beaucerons, bergers hollandais ou encore rottweilers. S’il répond à ces critères, le chien est alors soumis à une évaluation comportementale pour étudier sa vigilance, l’intérêt instinctif qu’il porte à un mouvement. Il ne doit être ni agressif, ni peureux.

“Le maître mot pour moi est équilibre, conclut Jean-Claude Broche. Du côté de l’agent, du côté du chien mais aussi au sein de leur binôme”.

Une formation initiale et continue

Une fois sélectionné, pour obtenir le droit d’exercer, l’agent de sécurité cynophile doit passer son CQP-APS (Certificat de Qualification Professionnelle Agent de Prévention et de Sécurité) et détenir une carte professionnelle délivrée par le CNAPS.

Cette certification est délivrée à la suite d’une formation qui se base sur des enseignements théoriques  – avec entre autres, des modules de législation ou encore de biologie animale – mais aussi sur une importante partie pratique (cynotechnie).

Les binômes travaillent en effet énormément sur le terrain : exercices d’obéissance, de sociabilisation, de détection d’anomalies et de défense du maître. “On apprend surtout aux élèves à « lire » leur chien. Si vous voulez savoir si un maître-chien est compétent, regardez comment il marche : il doit être derrière son chien et l’observer en permanence. Si le chien s’arrête, s’il aboie ou dresse les oreilles, c’est que quelque chose l’interpelle. L’agent doit être capable de comprendre en quelques secondes ce qu’il se passe.” Cet entraînement permet par ailleurs de tisser des liens forts entre l’homme et l’animal, de manière à renforcer la confiance et la complicité. “C’est cette connivence qui rend le binôme performant”.

On apprend surtout aux élèves à « lire » leur chien. Si vous voulez savoir si un maître-chien est compétent, regardez comment il marche : il doit être derrière son chien et l’observer en permanence.

Une fois diplômé, l’agent cynophile de sécurité pourra exercer dès réception de sa carte professionnelle. La formation ne s’arrête pas pour autant. Non seulement, l’agent est soumis à un “recyclage” obligatoire tous les 5 ans (MAC) mais beaucoup d’entreprises financent par ailleurs des séances d’entraînement régulières pour maintenir les compétences de leurs équipes cynophiles. Depuis 2016, le binôme est d’ailleurs soumis à un test d’évaluation annuel sous le contrôle d’un spécialiste.

Pourquoi un tel manque d’agents de sécurité cynophiles en France ? – RNMPS
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