Dans un contexte où les organisations sont exposées à des menaces multiples et évolutives, leur capacité à faire face à l’imprévu repose sur une stratégie solide, articulée autour de trois piliers : la gestion des risques, la réponse d’urgence et la gestion de crise. Lilian Laugérat, expert en gestion des risques sûreté et directeur de Solace, nous explique comment structurer, coordonner et faire vivre ce triptyque pour renforcer la résilience opérationnelle et décisionnelle des entreprises. Gestion des risques, réponse d’urgence, gestion de crise : un triptyque à articuler autour de principes communs Lorsqu’une organisation est confrontée à une situation hors norme – accident majeur, incident industriel, cyberattaque, événement climatique extrême, crise sanitaire ou médiatique – sa capacité à réagir rapidement, efficacement et avec discernement est déterminante. Cette capacité ne repose pas uniquement sur des procédures rédigées ou sur l’intuition du moment : elle s’ancre dans une préparation rigoureuse, structurée autour de trois volets essentiels et complémentaires que sont la gestion des risques, la réponse d’urgence et la gestion de crise. Ce triptyque, lorsqu’il est pensé en cohérence, constitue la colonne vertébrale de la réponse organisationnelle face à tout type de scénario, anticipé ou non. Il permet de protéger les personnes et les actifs, d’assurer la continuité d’activité, de préserver l’environnement, et de maintenir la confiance des parties prenantes internes et externes. La gestion des risques : anticiper l’imprévu et structurer la préparation La gestion des risques consiste à identifier, analyser et traiter les menaces susceptibles d’affecter l’organisation. Elle ne vise pas seulement à éviter les événements indésirables, mais surtout à réduire leur probabilité et leurs impacts. Elle s’appuie sur des outils comme la cartographie des risques, les études de dangers, les audits, et des analyses de vulnérabilité. Mais au-delà de l’analyse, il s’agit de mettre en œuvre des plans d’actions concrets pour réduire les risques identifiés, renforcer la sécurité des installations, former les équipes, mettre en place des barrières de protection, etc. L’un des leviers les plus efficaces reste l’anticipation active. Il ne s’agit pas seulement de documenter les risques, mais de construire des scénarios réalistes, d’élaborer des protocoles adaptés, d’organiser des exercices réguliers. Ces derniers permettent de tester les dispositifs en place, d’identifier les points faibles, d’améliorer la coordination entre les services, et de familiariser les collaborateurs avec les réflexes à adopter. En somme, de faire entrer la culture du risque dans le quotidien de l’organisation. En savoir plus Comment anticiper une situation de crise ? En savoir plus Comment anticiper une situation de crise ? Cette démarche suppose aussi de définir en amont la gouvernance de crise : qui décide, sur quelle base, avec quels moyens ? Il est crucial de clarifier les rôles et responsabilités, d’identifier les ressources critiques, et de structurer les dispositifs d’alerte, d’escalade et de coordination. Une gestion des risques efficace est donc autant un travail de fond stratégique qu’un processus vivant, évolutif, à réinterroger régulièrement. La gestion des risques consiste à identifier, analyser et traiter les menaces susceptibles d’affecter l’organisation. La réponse d’urgence : réagir vite et protéger l’essentiel Quand un événement survient de manière soudaine, la priorité absolue est de protéger les personnes, de limiter les dégâts, et d’agir pour éviter une aggravation de la situation. C’est là qu’intervient la réponse d’urgence, avec ses procédures spécifiques, ses moyens opérationnels, et ses dispositifs d’alerte et d’intervention. L’objectif est de mettre en œuvre sans délai les plans préalablement établis : plan d’opération interne (POI), plan communal de sauvegarde (PCS), plan d’intervention spécifique (PPI), plan d’évacuation, plan de continuité d’activités, etc. Ces plans doivent être connus, partagés, et surtout, les équipes doivent bien se les approprier. Car en situation de stress, c’est la pratique qui prime sur la théorie. La réponse d’urgence implique également une coordination fluide avec les services de secours, les autorités locales, les prestataires spécialisés ou encore les riverains si nécessaire. Le lien entre l’interne et l’externe doit être établi en amont, avec des référents identifiés et des modes de communication définis. Un point essentiel : la rapidité d’exécution ne doit pas se faire au détriment de la cohérence. D’où l’importance de l’entraînement régulier, de la simulation, et de l’évaluation post-événement. C’est ainsi qu’une organisation peut apprendre de chaque alerte et améliorer en continu sa capacité de réponse. La gestion de crise : piloter, décider, communiquer dans l’incertitude Lorsque l’événement dépasse la capacité de réaction immédiate ou que ses impacts sont multiples, durables ou diffus (réputationnels, juridiques, sociaux, etc.), on entre dans une autre dimension : celle de la gestion de crise. La crise, par définition, introduit un niveau élevé d’incertitude, de complexité, voire de chaos. Elle remet en cause les schémas classiques de décision et de management. Il faut donc constituer une cellule de crise capable d’analyser la situation en temps réel, de poser un diagnostic fiable, de prendre des décisions parfois difficiles, et de coordonner les actions dans un environnement mouvant. Cette cellule doit également gérer la communication en période de crise : en interne (rassurer les équipes, maintenir le lien), en externe (entités impactées, autorités, médias, clients, opinion publique), mais aussi avec les parties prenantes plus spécifiques selon le contexte. La gestion de crise repose donc et avant tout sur des compétences humaines, organisationnelles et techniques, mais aussi sur un facteur souvent négligé : la lucidité. Lucidité pour reconnaître les signaux faibles, pour accepter l’inconfort de la décision rapide, pour savoir mobiliser autour de soi, et surtout pour revenir à l’essentiel : la création d’un modèle de réponse à partir de plans d’action apportant un maximum de rationalité. Vers l’intégration d’une méthodologie universelle de gestion des incidents Ce n’est qu’en articulant de manière cohérente ces trois dimensions – gestion des risques, réponse d’urgence et gestion de crise – que l’organisation pourra faire face efficacement à l’imprévu. Ce triptyque ne fonctionne que s’il est pensé en amont, testé en continu, et piloté avec discernement au moment critique. La crise ne se décrète pas, elle se prépare. Et la meilleure des préparations repose sur une vision globale, une culture partagée du risque, et une capacité collective à décider et à agir dans l’incertitude. Il ne faut jamais oublier que la gestion de crise est une extension de notre quotidien. Et chaque événement que nous vivons implique toujours la même histoire : des faits à confirmer, des impacts à analyser, des parties prenantes à lister et des plans d’action à implémenter. Facebook Twitter LinkedIn VOIR SON PROFIL LILIAN LAUGERAT PRÉSIDENT DE SOLACE ET EXPERT EN GESTION DES RISQUES SÛRETÉ Lilian Laugérat dirige le cabinet de conseil Solace, spécialisé dans l'analyse des risques sûreté et la posture de gestion de crise. Solace est une entité de Cecys Group, filiale du Groupe Goron. Lire aussi Comment anticiper une situation de crise ? 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