L’organisation de fan-zones pour les récents et futurs évènements en France implique le déploiement de moyens considérables destinés à l’accueil du public. Un enjeu majeur pour les forces de l’ordre comme pour la sécurité privée.

Si 2018 a consacré la victoire de la France lors de la Coupe du monde de football, elle est aussi l’année où le nombre de “fan-zones” officielles – ces espaces réservés aux supporters au cœur des villes, notamment pendant les événements sportifs – a été particulièrement réduit.

En effet, dans le contexte d’une menace terroriste avérée, la masse civile et les lieux de regroupements constituent des cibles privilégiées et peuvent ainsi être visés par des actions hostiles. Une attention toute particulière doit donc être portée à leur sécurisation.

Une sécurisation complexe et coûteuse

Les conditions de sécurisation sont aussi nombreuses que variées : plots fixes en béton contre les voitures ou les camions béliers, barrières, portiques de détection métallique, palpations, filtrage d’accès avec consignation de l’alcool ou des fumigènes, sûreté du périmètre extérieur et des parkings à proximité, équipes cynophiles spécialisées en recherche d’explosifs, gestion des facilités d’accès pour les secours et les forces de l’ordre, dégagement des voies d’évacuation d’urgence… Ces dispositifs ne sont que quelques périmètres d’activité qui peuvent être délégués au secteur de la sécurité privée. Ils démontrent à eux seuls la nécessité de disposer d’importants volumes d’agents mais aussi de moyens techniques éphémères relativement coûteux.

Or, les communes ne disposent pas toujours des effectifs ou des moyens suffisants pour sécuriser ces espaces publics atypiques. Rappelons d’ailleurs que pendant l’Euro de football 2016 organisé en France, les communes qui avaient l’autorisation préfectorale d’installer une fan-zone publique, bénéficiaient également du soutien de l’État et de celui de l’UEFA (Union of European Football Associations) pour financer la sécurisation des sites.

Gérer la densité humaine et éviter les mouvements de panique

Le coût de la sécurisation n’est pas le seul paramètre qui a engendré la réduction des fan-zones en 2018. En effet, en raison de la menace terroriste, le Ministère de l’Intérieur a indiqué aux municipalités que ces dernières ne pourraient en aucun cas être organisées sur un espace public ouvert. Les retransmissions pouvaient néanmoins être envisagées sous réserve qu’elles « aient lieu dans des espaces clos ou strictement délimités » (stades, salles omnisports, etc.) avec un accès strictement contrôlé « par un dispositif de sécurité à la charge de l’organisateur » et avec l’aval des Préfets compétents. Cette annonce officielle faite deux semaines avant le début du Mondial 2018 n’a laissé que peu de temps aux communes volontaires pour s’organiser et faire sponsoriser leurs fan-zones.

Cette décision rappelle que la densité humaine d’une fan-zone est le premier paramètre à prendre en compte pour en assurer la sécurisation. Cela est d’autant plus important que tout mouvement de foule peut, à lui seul, causer des dégâts, voire être meurtrier. À titre d’exemple, deux jours après le traumatisme des attentats du 13 novembre 2015, l’éclatement d’une ampoule halogène, similaire à une détonation, avait créé un mouvement de panique Place de la République à Paris, et engendré bousculades, piétinements et blessures. Un mouvement de panique est précisément ce que redoute l’organisateur d’une fan-zone qui doit parvenir à canaliser la peur tout en fluidifiant l’évacuation.

La densité humaine d’une fan-zone est le premier paramètre à prendre en compte pour en assurer la sécurisation. Cela est d’autant plus important que tout mouvement de foule peut, à lui seul, causer des dégâts, voire être meurtrier.

Afin de limiter ce risque, il existe un ratio surface/nombre de supporters. Ainsi, pendant l’Euro 2016, la fan-zone du Champ de Mars à Paris, occupait 130.000 m² (équivalent à 30 terrains de football) mais ne pouvait accueillir que 92.000 supporters. Ce type de restriction peut d’ailleurs créer des frustrations et engendrer des incidents qui doivent être anticipés et gérés aux entrées par les services de sécurité privée. Des incidents de ce type ont d’ailleurs émaillé cette même fan-zone le 15 juillet 2018.

Anticiper les Jeux Olympiques de Paris

La sécurisation des fan-zones est un sujet d’autant plus crucial pour la France que Paris est la prochaine ville hôte des Jeux Olympiques de 2024. Un événement d’une ampleur considérable qui amènera dans la capitale, de nombreuses personnes : délégations du monde entier, sportifs, touristes, supporters. L’enjeu sera alors d’assurer la sécurité de tous, sur les lieux des épreuves sportives mais aussi dans les espaces de retransmission publics, voire jusque sur les lieux d’hébergement.

Le 7 juillet 2005, au lendemain de l’annonce de l’attribution des JO 2012 à la ville de Londres, quatre kamikazes s’étaient fait exploser dans les transports en commun (métros et bus), tuant 52 personnes et en blessant environ 700 autres. Quatre autres tentatives d’attentat à l’explosif avaient eu lieu le 21 juillet 2005 mais seuls les détonateurs avaient fonctionné. Ces événements avaient eu pour conséquence de faire passer le budget prévisionnel alloué à la sécurisation des Jeux londoniens de 250 M€ à 1,16 Md€, incluant les hôtels et les fan-zones.

Si le budget de la sécurisation des Jeux parisiens de 2024 n’a pas encore été officiellement annoncé, il y a fort à parier que les acteurs de la sécurité privée seront nécessairement sollicités, tant pour la sécurisation des stades que pour celle des fan- zones. D’ici là, le législateur aura, normalement, défini les conditions de formation et d’emploi des Agents de Surveillance Renforcée armés qui disposeront alors de moyens potentiellement plus dissuasifs.

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