Alors que les paiements en espèces sont en chute libre avec la crise sanitaire, le secteur des transports de fonds doit se réorganiser de A à Z. D’autant que la baisse des paiements en liquide n’est pas la seule mauvaise nouvelle que doivent affronter les entreprises convoyeuses de fonds.

“Espèces refusées.” Les pancartes avec cette mention ont fleuri pendant le confinement. Pour limiter les contacts avec leurs clients et les risques de contamination, de nombreux commerces ont choisi de ne plus accepter les paiements en liquide. La mesure est illégale, mais cela n’a pas freiné les commerces pour autant. Selon une enquête de l’Ifop pour le transporteur de fonds Brinks, 11 % des Français et des Françaises déclarent avoir fait face à des refus de paiement en liquide ces derniers mois. Face au risque de transmission du virus, les commerçants ont en effet préféré inciter au paiement sans contact par carte bancaire – dont le plafond est d’ailleurs passé de 30 à 50 euros, le 11 mai 2020. Résultat : le confinement aura confirmé la diminution de l’utilisation des paiements en liquide, déjà bien marquée depuis quelques années. Selon la Banque des règlements internationaux, la part des paiements sans contact dans les transactions est passée de 30 % en septembre 2019 à 65 % en juin 2020, dans le monde. Les retraits d’espèces ont quant à eux diminué de 20 % dans l’Hexagone, d’après la Banque de France. Pour le secteur des transports de fonds, cela représente une diminution d’activité considérable. 
Pourtant, la production d’espèces progresse : la Banque de France imprime 9 % de billets en plus en 2020 par rapport à 2019. Un paradoxe qui ne profite cependant pas au transport de fonds. “La demande en espèces de précaution a augmenté dans certaines économies”, explique la Banque centrale européenne (BCE) dans une récente étude. En somme : les acteurs économiques – notamment les citoyens – demandent davantage de cash, mais pour le stocker en cas de problème, et non pour le faire circuler.

Une reprise en dents de scie pour les transports de fonds

Pendant le confinement, la CFDT estime ainsi que les transports de fonds ont dû réduire leur activité de 60 %, avec la fermeture des magasins et des banques. Chez Loomis France, l’une des entreprises phares du secteur, par exemple, près de 70 % des effectifs ont été mis en chômage partiel. Mais, dès les semaines précédant la rouverture des lieux publics, en mai 2020, les transporteurs de fonds ont dû reprendre sur les chapeaux de roue, pour réapprovisionner en urgence les caisses des magasins français. À tel point que plusieurs sociétés de transports de fonds ont demandé – sans succès – au ministère de l’Intérieur de relever le plafond des espèces transportées dans les véhicules légers, pour qu’il passe de 30 000 à 100 000 euros.
Mais cette reprise de l’activité masque une crise plus profonde, accentuée par la situation sanitaire. Dès 2019, le marché était en récession, avec un chiffre d’affaires global en baisse de 1,7 % par rapport à 2019, selon le magazine Face aux risques. Avec la baisse des paiements en cash due à la crise sanitaire, nul doute que la situation n’est pas en passe de s’améliorer.

Des caisses de tri de la Banque de France bientôt fermées ?

Pour ajouter à la crise, la Banque de France doit réorganiser son réseau fiduciaire, et annoncer un grand plan de restructuration d’ici novembre 2020. Selon la CGT, ce plan prévoirait la fermeture de plus d’une vingtaine de caisses de tri en France, sur les 37 que compte actuellement le réseau. Objectif de la Banque de France : réaliser des économies sur les transports de fonds entre ses différentes caisses sur tout le territoire. Un nouveau manque à gagner pour les sociétés de transport de fonds déjà fragilisées. 

Malgré tout, certains chiffres peuvent rassurer les professionnels du secteur. Selon la Banque centrale européenne, 10 % des citoyens et citoyennes de la zone euro n’ont pas de carte bancaire, et utilisent donc massivement le cash. En France, de nombreuses prestations sociales sont d’ailleurs versées en liquide. Et en Suède, le projet de limiter l’utilisation des billets et pièces de monnaie pour aller vers une société sans cash a fait marche arrière. Même très fragilisé par la crise, le secteur des transports de fonds a donc encore de beaux jours devant lui.

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