Constituant l’une des clés du succès pour lutter contre le chômage des jeunes, l’apprentissage voit s’ouvrir à lui de nouvelles perspectives dans la filière de la sécurité privée. 

En pleine réforme gouvernementale de l’apprentissage, CECYS – centre de formation de la société GORON – lance son “Campus ” pour former en apprentissage, les jeunes aux métiers de la sécurité privée. Une promotion d’une quarantaine de jeunes fera sa rentrée en septembre 2018. C’est l’une des toutes première fois qu’une entreprise de sécurité privée monte sa structure de formation en apprentissage. Ce projet a pu voir le jour grâce à un partenariat avec la Chambre de Commerce et d’Industrie d’Ile de France, son école d’activités l’EA et son CFA (Centre de Formation par l’Apprentissage). 
Edith BRULARD, responsable ingénierie pédagogique et partenariats à l’Ecole Supérieure de la Sûreté des Entreprises et chez CECYS, nous explique ce projet et pourquoi l’apprentissage a de l’avenir dans la filière de la sécurité privée.

Cecys lance son campus. Est-ce la première offre de formation en apprentissage aux métiers de la sécurité privée ?

E.B. Non, les formations en apprentissage dans le domaine de la sécurité privée sont déjà proposées par l’Education nationale et elles sont également initiées, depuis quelques mois, par la branche professionnelle. Il existe ainsi un CAP Agent de Sécurité et un bac professionnel.

En revanche, c’est l’une des première fois qu’une entreprise de sécurité privée lance son campus d’apprentissage. C’est réellement novateur car cette pratique existe plutôt dans les grandes entreprises, publiques notamment. Par exemple, La Poste possède son propre CFA. C’est donc un vrai pari pour CECYS et GORON qui font le choix d’investir financièrement mais aussi humainement sur des jeunes talents.

Pourquoi ouvrir ce Campus Apprentissage ? A quels enjeux cela répond-il ?

E.B. Le secteur de la sécurité privée a beaucoup de postes à offrir, notamment en CDI, mais rencontre de relatives difficultés à recruter, quantitativement et qualitativement. En cause : un rythme de travail qui n’est pas toujours évident à gérer, avec des horaires parfois décalés le soir et le weekend. Mais aussi un problème d’image : les métiers de la sécurité privée sont très peu valorisés auprès des Français. A tort, car il s’agit en réalité d’une filière métier qualifiée et prometteuse.

Avec l’apprentissage, notre objectif est donc de recruter des jeunes talentueux et curieux mais aussi de faire en sorte de les garder. En effet, d’une manière générale en France, sur des niveaux CAP ou BEP, on estime à environ 30% le taux de rupture des contrats d’apprentissage. Notre objectif est de limiter au maximum ce taux. Et pour y parvenir, le meilleur moyen est de rendre la formation la plus intéressante possible.

Justement, en quoi consiste la formation ? Comment l’avez-vous conçue pour la rendre intéressante pour les jeunes ?

E.B. Le Campus CECYS offrira deux niveaux de formation. Un niveau BEP / CAP, en un an, qui débouchera sur l’obtention du titre professionnel d’agent de prévention et de sécurité. Et un titre équivalent bac professionnel en deux ans, qui mènera au diplôme de chef de poste, une fonction un peu plus managériale.

Ces deux titres sont reconnus par l’état et la formation respecte un référentiel bien précis. En revanche, en parallèle des disciplines professionnelles, nous avons introduit des enseignements inédits, axés sur les compétences comportementales, la culture générale et le savoir-être. Les jeunes pourront à terme obtenir le Certificat de compétences CléA reconnu, attestant qu’ils maîtrisent un socle de connaissances solides et qu’ils disposent de compétences utiles pour s’intégrer dans l’emploi de manière durable et responsable.

En parallèle des disciplines professionnelles, nous avons introduit des enseignements inédits, axés sur les compétences comportementales, la culture générale et le savoir-être.

En effet, en développant notre projet de Campus Apprentissage, nous avons réalisé que les formations en sécurité privée de l’Education nationale étaient très scolaires. Elles sont basées sur des enseignements généralistes et des pédagogies traditionnelles qui n’intéressent pas forcément les jeunes et ne sont pas toujours adaptés à la réalité des métiers auxquels ils sont formés.

Avec la préparation du certificat CléA, les jeunes développeront des compétences utiles au quotidien sur le terrain : l’expression orale en français, la capacité à communiquer de la bonne manière pour faire passer des messages choisis, le raisonnement logique et mathématique, l’utilisation des outils numériques, le travail en autonomie et en équipe ou encore les notions d’éthique et de développement durable. Par ailleurs, l’anglais oral sera obligatoire. Nous avons aussi décidé de former les jeunes à l’utilisation des drones, ce qui n’a encore jamais été fait dans aucune formation. Le tout sera basé sur des méthodes pédagogiques actives et innovante : plateforme de e-learning, jeux de rôle, intervention de comédiens, etc. C’est la première fois qu’une formation en sécurité privée est organisée ainsi !

L’apprentissage a-t-il de l’avenir dans la filière de la sécurité privée ?

E.B. Jusqu’ici le secteur n’avait pas vraiment misé dessus mais les choses sont en train de changer. Je pense que l’apprentissage adresse une problématique plus globale de réorganisation de la formation dans l’ensemble de la filière sécurité privée.

Aujourd’hui, le plus haut niveau proposé en apprentissage par l’Education nationale est le bac professionnel. L’université de son côté, propose une licence spécialisée mais c’est encore insuffisant. Pour attirer des jeunes qui ont du potentiel, il faut leur proposer une projection sur le long-terme ; leur offrir de passer un BAC+2, puis une licence et pourquoi pas un master, mais surtout leur proposer de vraies carrières en valorisant les parcours ! Un jeune qui sait qu’il va pouvoir évoluer, mieux gagner sa vie, avoir des responsabilités sera bien plus intéressé par les métiers de la sécurité. Les fédérations professionnelles ont des ambitions en matière de formation, l’apprentissage peut justement être l’occasion pour elles de repenser leurs offres et d’accélérer la professionnalisation du secteur.

Les fédérations professionnelles ont des ambitions en matière de formation, l’apprentissage peut justement être l’occasion pour elles de repenser leurs offres et d’accélérer la professionnalisation du secteur.

L’apprentissage a donc bien de l’avenir pour la sécurité privée mais à condition de l’envisager sur un parcours de formation complet qui va jusqu’au supérieur. C’est d’ailleurs l’objectif du Campus CECYS qui ambitionne de créer dans les années qui viennent, un niveau Bac+2 puis de développer son offre jusqu’au Master 1.

Crédit photo principale : © GORON

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