Rendre Notre Monde + Sûr lance une nouvelle série “Portraits” pour aller à la rencontre des experts et décideurs qui travaillent dans le domaine de la sûreté et de la sécurité privée. Dans ce second volet, nous vous invitons à découvrir le parcours d’Eric Davoine, Directeur Sûreté régional à la Walt Disney Company, pour les zones Europe de l’Ouest et Afrique francophone. Après seize ans de carrière militaire, ce haut responsable a fait le choix de se tourner vers le secteur de la sécurité-sûreté privée. En alliant expertise technique et “business”, il est devenu l’un des partenaires stratégiques de son entreprise. Découvrez son parcours, sa vision de sa fonction et son souhait de voir grandir l’ouverture d’esprit dans son métier. Pouvez-vous nous décrire vos missions au sein de la Walt Disney Company ? Depuis deux ans, j’occupe le poste de Directeur sûreté régional pour les zones Europe de l’Ouest et Afrique francophone à la Walt Disney Company. Quand j’évoque ma fonction, on me demande souvent si je travaille sur le parc Disneyland de Marne-la-Vallée en région parisienne… Ma mission est très différente. Il faut savoir que l’entreprise Walt Disney est implantée dans de nombreux pays du monde, et qu’elle y emploie plus de 200 000 personnes. Ce sont des professionnels dédiés à tous les départements de Disney : cinéma, communication, vente en magasin, partenariats, ressources humaines, et même des journalistes qui travaillent pour les chaînes télévisées de notre entreprise. Mon travail consiste à assurer la sûreté des collaborateurs dans les 32 pays d’Europe de l’Ouest et d’Afrique francophone dont j’ai la charge. Le deuxième volet de ma fonction est de prévoir et de gérer la sûreté des événements organisés par Disney (festivals, concerts, animations) dans ces régions. Concrètement, je travaille en partenariat avec des entreprises de sécurité privée locales, afin d’organiser les opérations de sûreté pour protéger nos collaborateurs et nos événements à l’étranger. Après avoir évalué les risques, ces sociétés prestataires élaborent des plans de sûreté que je valide avec elles, en fonction des consignes fixées. Selon l’importance de l’événement et la sévérité du niveau de risques évalué, je peux gérer ces opérations à distance ou me rendre sur place lorsque cela est nécessaire. Pour l’entreprise, cet enjeu sécuritaire est colossal : il s’agit de préserver l’image de la marque dans le monde entier. Pour l’entreprise, cet enjeu sécuritaire est colossal : il s’agit de préserver l’image de la marque dans le monde entier. Pouvez-vous nous parler de votre rôle en tant que Président de l’ASIS France, la première association internationale en gestion des risques et sécurité sûreté ? Je suis en effet bénévole de cette association depuis maintenant quatre ans. En tant que Président du chapitre France d’ASIS International, mon rôle consiste à animer la vie de l’association, organiser des événements et des rencontres entre professionnels, mais aussi mettre en place des groupes de réflexion thématiques autour des grands enjeux de notre secteur. Au sein de cette association, nous avons d’ailleurs structuré deux comités. Le premier est le conseil des “Young Professionals” (Jeunes Professionnels). Il a vocation à favoriser l’évolution de carrière des professionnels de la sécurité et de la sûreté de moins de 40 ans. Le second est le conseil des “Women in security”, qui a pour but de promouvoir la féminisation du secteur de la sécurité. En effet, les jeunes et les femmes sont d’après moi les “laissés-pour-compte” de nos métiers de la sécurité. Notre sphère professionnelle est encore malheureusement en majorité occupée par des hommes de plus de 50 ans issus des mêmes milieux. Je suis convaincu que le secteur aurait tout à gagner à recruter des profils bien plus diversifiés et à les voir progresser à des postes à responsabilité. Ces deux comités de l’ASIS ont justement pour mission de créer du lien entre ces jeunes candidates et candidats, et les responsables du secteur. Les jeunes et les femmes sont d’après moi les “laissés-pour-compte” de nos métiers de la sécurité. Je suis convaincu que le secteur aurait tout à gagner à recruter des profils bien plus diversifiés et à les voir progresser à des postes à responsabilité. Quel a été votre parcours professionnel pour arriver à vos fonctions actuelles ? Comme beaucoup de professionnels de la sécurité, j’ai commencé mon parcours dans le domaine militaire. Après seize ans passés dans ce milieu, j’ai quitté l’armée sans diplôme reconnu dans le civil, mais avec beaucoup de compétences. Cela m’a permis d’être d’abord formateur en sécurité, puis d’être recruté dans la banque Natixis en tant que responsable des opérations sécurité-sûreté. Au cours des six années passées dans cette société, j’ai eu l’occasion de progresser à des postes différents, mais aussi de suivre en parallèle de mes journées de travail une licence professionnelle en management de la sécurité à l’Université Paris Descartes — dans laquelle j’ai aujourd’hui la chance d’enseigner — . A la suite de cette licence, j’ai souhaité donner une nouvelle impulsion à ma carrière et j’ai suivi une formation MBA en management d’entreprise, sans rapport direct avec le monde de la sûreté. Cette formation a marqué un grand virage dans ma carrière. J’ai eu l’occasion de progresser en anglais — compétence qui me manquait jusqu’à présent — , d’effectuer plusieurs stages à l’étranger et de donner ainsi une véritable tournure internationale à ma carrière. J’ai aussi suivi des cours de ressources humaines, de comptabilité, de stratégie, de commerce… Toutes ces matières jusqu’ici inconnues pour moi m’ont permis de sortir de ma zone de confort et d’avoir une nouvelle approche de la sûreté en entreprise. J’ai appris à me positionner à la place des clients — les directions d’entreprises — pour mieux intégrer leurs problématiques, et non plus me cantonner à la seule expertise technique. Tout cet apprentissage m’a permis de gagner en crédibilité et en légitimité dans mon travail. D’une manière générale, quelle vision portez-vous sur la fonction de Directeur Sûreté au sein des entreprises ? Quels sont les enjeux de cette fonction pour l’avenir ? C’est un poste à grande responsabilité mais pour les entreprises, cette fonction représente souvent une contrainte. Celle de devoir investir dans des processus de sécurité coûteux, dont on ne comprend pas toujours l’utilité. C’est pourquoi la sûreté est souvent perçue par les dirigeants d’entreprises comme une source de coûts, et non de profits. C’est bien dommage… Le directeur sûreté ne devrait plus être perçu comme un “empêcheur” chargé de signaler les risques et menaces, mais comme un partenaire stratégique de l’entreprise. C’est selon moi le principal enjeu de la fonction. Or, à l’heure actuelle, la majorité des directeurs sûreté se positionnent comme des experts techniques. Ils devraient au contraire être davantage à l’écoute des entreprises de manière à mieux intégrer leurs problématiques économiques et financières. C’est seulement à cette condition qu’ils seront perçus comme de véritables “business partners” de l’entreprise. Cela implique une réelle remise en question pour construire une dynamique forte au service de l’entreprise. C’est justement en ce sens que j’ai essayé de progresser ces dernières années au sein de la Walt Disney Company. La sûreté est souvent perçue par les dirigeants d’entreprises comme une source de coûts, et non de profits. C’est bien dommage… Enfin, j’aimerais rappeler que les responsables sécurité-sûreté devraient également cultiver de toute urgence leur ouverture d’esprit pour recruter des professionnels de milieux et de parcours variés. Au début de ma carrière, j’ai moi-même été souvent tenté de construire mes équipes de travail avec d’anciens camarades de mon unité militaire. Aujourd’hui, je réalise que c’est en réalité se priver de bien d’autres ressources qui permettraient d’enrichir nos équipes. Retrouvez le premier volet de notre série “Portrait de décideur” consacré à Claire Niclause, Responsable de la sécurité privée à la RATP. Facebook Twitter LinkedIn
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